Pourquoi tant de mansuétude à l’égard de la république islamique du Pakistan ?
/Le 3 juillet 2025, dans notre article intitulé « Inde - Pakistan : la réalité de l’affrontement de Mai 2025 »*, nous attirions l’attention de nos lecteurs sur deux faits majeurs :
L’influence civile au Pakistan s’est encore affaiblie depuis la prise de contrôle des Forces Armées par le général Asim Munir en 2022 : un homme autoritaire, qui était auparavant patron des Services de Renseignement de l’Armée (ISI).
Le rapprochement d’une partie de l’Armée pakistanaise avec le terrorisme islamique pourrait amener à une certaine radicalisation lors d’une prochaine confrontation avec l’Inde, donc à l’augmentation du risque nucléaire.
Une parodie de Justice
Dans ce contexte, le tweet** du 16/09/2025 de Marco Rubio, Secrétaire d’État américain (autrement dit le ministre des Affaires Étrangères du Président Trump) a attiré notre attention. Reproduisant l’arrêt d’une Cour de Justice pakistanaise, Marco Rubio nous informe « d'une décision de justice réelle concernant Khadija Shah, citoyenne américano-pakistanaise. La junte militaire l'a condamnée à cinq ans de prison car des dirigeants et des sympathisants du PTI (Pakistan Tehreek-e-Insaf) avaient «aimé» ses publications sur Instagram et Tik Tok ».
Rappelons que le PTI (Pakistan Tehreek-e-Insaf) est le parti de l’ancien 1er ministre pakistanais Imran Khan, jeté en prison pour 14 ans le 9 mai 2023, sur des soupçons de corruption qui ressemblent fortement à une cabale. Ses partisans affirment d’ailleurs que sa chute est un nouvel exemple de l'ingérence des généraux pakistanais dans la politique locale pour imposer leur candidat, Shehbaz Sharif.
D’après « The Telegraph » du 02/09/2025, les conditions de détention d’Imran Khan sont inhumaines, ses partisans affirmant que cet homme de 72 ans subit en prison une « torture psychologique ». (en photo, manifestation de sympathisants du PTI).
Dans ce contexte général, comment ne pas être interpellé par un autre article du journal « The Telegraph » du 15 septembre 2025*** titré : « Le Commonwealth aurait contribué à dissimuler les fraudes électorales au Pakistan » !
Et de poursuivre : « Un rapport divulgué révèle que le régime militaire a « volé » la victoire au parti PTI d'Imran Khan lors des élections de 2024, grâce à des fraudes et à des manipulations électorales…. Le Commonwealth est accusé d'avoir collaboré avec le gouvernement pakistanais, soutenu par l'armée, afin de dissimuler les fraudes électorales massives… Ce rapport du Commonwealth, qui avait été censuré jusqu'à présent, révélait en réalité des fraudes électorales généralisées et accusait le gouvernement de violation des droits politiques fondamentaux, notamment la liberté d'association, de réunion et d'expression. Le régime soutenu par l'armée avait limité la capacité de campagne du parti Pakistan Tehreek-e-Insaf (PTI) d'Imran Khan… et influencé le résultat en faveur du gouvernement pakistanais actuel…. Les observateurs ont noté plusieurs incohérences entre les procès-verbaux de vote et les résultats globaux par circonscription… ».
Une surveillance de masse
Face à ces révélations de « The Telegraph », comment alors ne pas prendre au sérieux le rapport d’Amnesty International****, intitulé « Ombres du Contrôle » et publié le 09 septembre 2025, qui affirme que « Le système de surveillance web et le système de gestion des interceptions légales au Pakistan fonctionnent comme des instruments de contrôle total, espionnant constamment la vie des citoyens. Au Pakistan, les SMS, les e-mails, les appels et l'accès à internet sont tous surveillés…permettant aux forces armées et au service de renseignement ISI d'accéder aux données des utilisateurs… »
L'enquête d’Amnesty International, aidée par différents médias et groupes, révèle comment les autorités pakistanaises ont obtenu des technologies auprès d'entreprises étrangères, via une chaîne d'approvisionnement mondiale clandestine d'outils de surveillance et de censure sophistiqués, notamment le nouveau pare-feu chinois WMS 2.0 et un système de gestion des interceptions légales - LIMS.
D’après ce rapport, « LIMS et WMS 2.0 sont financés par des fonds publics, utilisent des technologies étrangères et servent à réprimer la dissidence, ce qui constitue une grave violation des droits humains au Pakistan... Les autorités achètent des outils de surveillance et de censure de plus en plus sophistiqués à des entreprises étrangères. Ces technologies renforçant la capacité du gouvernement à réprimer la dissidence, notamment contre les journalistes, la société civile et le public ».
Il faut souligner que le Pakistan est le sixième producteur mondial de coton et possède d'abondantes ressources naturelles, principalement du cuivre, du pétrole et du gaz.
Rappelons aussi que c’est la Chine qui a fourni, depuis 1976, les moyens au Pakistan de se doter de l’arme nucléaire…
Comme le soulignaient également Les Échos le 09 mai 2025, « l'Arabie Saoudite, la Chine et les Emirats Arabes Unis ont apporté collectivement 12 milliards de dollars » au Pakistan en 2024.
Pour financer la surveillance de masse de sa population ?
« Le Commonwealth et l'Union Européenne ont, pour la première fois dans l'histoire de l'observation étrangère de la démocratie pakistanaise, censuré leurs propres rapports sur les fraudes massives lors des élections de 2024, perpétrées par le régime militaire autoritaire du Pakistan », a écrit le PTI d'Imran Khan sur X.
Alors pourquoi tant de mansuétude à l’égard de ce régime ?
**https://x.com/pakistanwalli/status/1967974023062753289?s=48
Crédit photo: AFP